« La fin du cerf pour 200 bungalows », une tentative de coup de force de Pierre et Vacances
Posté par admin le 19 août 2009
Par Henri Lemaire
La gestion hasardeuse d’une petite commune de Sologne risque aujourd’hui de mener à la destruction d’un biotope exceptionnel.
Dhuizon dans le Loir-et-Cher, à une portée d’aile de balbuzard des tours de Chambord. Pays de grands domaines et de chasse, pour partie encore préservé des clôtures et des quads. Au cœur d’un massif forestier de 3.000 hectares, le village héritait en 1984 , par legs, d’une propriété destinée, selon les vœux de la donatrice, au bien être de ses concitoyens. L’édile local souhaitant développer l’économie du secteur décide en 1993 d’implanter dans une partie de cette propriété une zone artisanale. Il fait modifier le plan d’occupation des sols et lance les constructions. Plusieurs habitants du secteur s’y opposent, avec un argument de poids : Les usines sont plantées dans l’un des seuls passages de grands cervidés de la région Centre. Sous le couvert des bois, entre la forêt de Boulogne, proche de Blois et celle de Ligny proche d’Orléans, des centaines d’animaux circulent toute l’année. En 1998 la justice, par la voix de la Cour administrative d’appel de Nantes, tranche en faveur des cerfs.
Trois ans plus tard, la municipalité toujours autant embarrassée par ce domaine de 170 hectares, décide d’implanter à quelques centaines de mètres de ces usines un centre de loisirs de type accrobranche. L’activité dans un site trop isolé périclite en 2003. Une seconde tentative conduit au même échec l’année suivante. L’ardoise des Dhuizonnais se monte alors à 270.000 euros.
Le département inquiet de ce gâchis financier et environnemental voit arriver avec soulagement l’un des plus gros investisseurs privés de ce monde du loisir : Pierre et Vacances. La société ne peut pas refuser ce que lui apportent les élus sur un plateau : Une partie de ce site exceptionnel lui est vendue, effaçant ainsi le montant de la dette accumulée, et un accord est conclus sur la construction d’un centre aqualudique, au frais des collectivités et de l’Etat, afin de fidéliser les clients de Pierre et Vacances. Mais on est toujours là au beau milieu du passage des grands cervidés.
L’opposition ne tarde pas à réagir. Elle s’entoure cette fois de quelques spécialistes connus dont Xavier Legendre , directeur du parc animalier de la Haute Touche, professeur au muséum national d’histoire naturelle, Jean-Paul Grossin, cinéaste animalier auteur de plusieurs ouvrages sur le cerf et d’associations locales de défense de l’environnement. Parallèlement une enquête diligentée par le département du Loir-et-Cher conclut à un déficit annuel de fonctionnement du centre aqualudique de 200.000 euros, au bas mot. L’organisme WWF France, pourtant partenaire de Pierre et Vacances sur d’autres opérations, émet beaucoup de réserves sur le projet Dhuizonnais. Rien n’y fait, Pierre et Vacances s’accroche en se contentant d’une étude d’impact approximative. Dans quelques jours, l’investisseur déposera son permis de construire.
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Selon Xavier Legendre, « la zone forestière située entre la Ferté-Saint-Cyr et Dhuizon de part et d’autre de la D 13, constitue un couloir forestier couvert que les cervidés se trouvent obligés d’emprunter pour circuler entre le massif de Ligny et de Boulogne. Ce passage est la seule voie possible entre les propriétés grillagées qui constituent un obstacle majeur à la libre circulation des animaux. Le projet risque de provoquer une coupure en deux unités de cette population remarquable, avec la probabilité, à terme, d’un appauvrissement génétique. A une époque où le souci du développement durable et le maintien de la biodiversité vont orienter les futurs investissements, il ne semble pas opportun de mettre en œuvre une telle opération. »
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Sur le principe, Dhuizon, avec l’aide de la communauté de communes construit un centre aqualudique à disposition des populations du secteur et de la clientèle Pierre et Vacances. Ainsi le village dispose d’une activité de loisir et la commune d’un potentiel de clients qu’elle ne pourrait obtenir autrement. Coût : 5 millions d’euros.
Pierre et Vacances construit autour d’un vaste étang 200 bungalows pour les proposer à la vente et à la location.
L’ensemble à une emprise d’une quinzaine d’hectares au cœur de cette propriété des Veillas qui fait 170 hectares.
Cependant les communes voisines disposent déjà de centres de loisirs et d’hébergement, elles ne souhaitent pas payer le déficit de fonctionnement annoncé de 200.000 euros. De plus, l’étrange montage financier associant des fonds privés et des fonds publics, pour le bénéfice d’une activité privée, ne satisfait pas l’opinion. Développement indispensable du tourisme dans une ruralité moribonde répondent les investisseurs.
Source:
http://www.jne-asso.org/archives/07/15_juin/actu_natio.html#arret
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